La
découverte par Newton du mercure philosophal, à la fin du
XVIIème siècle, constitue le point de départ de cette
uchronie où l’alchimie a permis de nombreux progrès technologiques.
Désormais, les villes disposent d’un éclairage performant,
la communication à distance s’effectue au moyen d’éthérographes
et l’armement se voit doté de terrifiants moyens de destruction.
Ce sont d’ailleurs ces nouvelles armes qui ont permis à l’Angleterre
de venir à bout des forteresses françaises et de prendre
peu à peu l’avantage dans la guerre qui l’oppose à la France.
Après voir frôlé la mort, le vieux roi Louis XIV
a retrouvé une nouvelle jeunesse grâce à un élixir
persan et envisage une contre-offensive afin de reprendre les territoires
conquis par l’ennemi. Un ancien élève de Newton, Fatio de
Duillier, qui nourrit une féroce rancune contre son ancien maître,
promet au souverain une arme dévastatrice, le mystérieux
Canon de Newton, censé assurer la victoire définitive de
la France …
Le jeune Benjamin Franklin - apprenti dans l’imprimerie de son frère
aîné à Boston - et Adrienne de Montchevreuil, - ancienne
assistante de Madame de Maintenon - sont les véritables héros
de cette histoire. Leur passion commune pour la science va les projeter
malgré eux au cœur de la grande Histoire, dans une aventure rocambolesque
qui va bouleverser l’ordre du monde.
Benjamin invente un dispositif qui permet de capter les messages en
provenance de n’importe quel éthérographe alors que jusque-là,
les communications n’étaient possibles qu’entre deux appareils préalablement
accordés. En interceptant l’un de ces messages, il va concourir
à la résolution d’un problème mathématique
qui conduira, comme il s’en rendra compte un peu tard, à la création
d’une arme de destruction massive. De son côté, Adrienne,
qui vient d’être admise à la cour de Louis XIV, travaille
comme secrétaire de Fatio de Duillier. En dissimulant ses connaissances
scientifiques – la pratique des sciences étant interdite aux femmes
à cette époque – elle découvre peu à peu à
quel monstrueux projet se consacre son patron.
Avec Les Démons du Roi-Soleil J. Gregory Keyes nous offre
un roman original qui mêle à merveille un grand nombre d’influences
: de l’uchronie à la fantasy la plus débridée. L’auteur
met en scène de nombreux – et parfois surprenants – personnages
historiques. L’amateur d’histoire en tirera sans doute un plaisir supplémentaire.
Keyes invente aussi une science alternative - liée aux propriétés
du mercure philosophal - qu’il décrit avec force détails.
Il s’offre en outre le luxe d’une intrigue complexe et mouvementée
: le récit avance tambour battant, s’intéressant tout à
tour à Benjamin Franklin et à Adrienne de Montchevreuil dans
une succession de chapitres qui se terminent toujours par une chute à
suspense à la façon des grands feuilletonistes (l’auteur
fait d’ailleurs quelques clins d’œil appuyés à Alexandre
Dumas).
Les Démons du Roi-Soleil est le premier volume d’une
série intitulée L’âge de la Déraison qui compte
trois autres volumes encore inédits : A Calculus of Angels,
Empire
of Unreason et The Shadows of God. Au terme de ce premier volume,
l’auteur nous laisse sur une série de rebondissements qui laissent
le lecteur pantois et lui donnent envie de lire le volume suivant dans
les plus brefs délais !
Chapeau bas, Monsieur Keyes, pour cette merveille qui mérite
amplement son Grand Prix de I’Imaginaire 2002. |