Dépité
devant l'ignorance des hommes et l'inutilité de son savoir, le docteur
Faust brûle tous les livres de sa bibliothèque. C'est alors
que Méphistophélès lui apparaît et lui propose
un pacte en échange du savoir absolu. Méphistophélès
lui prédit que ce savoir ne fera que précipiter l'extinction
de l'humanité, mais Faust accepte le pacte, pensant que l'humanité
est à même d'accéder à la sagesse. Il commence
par écrire à divers scientifiques afin de leur faire part
de son savoir. Mais ses premières révélations sont
bien mal acceptées par ses pairs qui le regardent de haut. On ne
chamboule pas si aisément les convictions ni l'ordre établi.
Faust se lance alors dans une débauche de création et invente
le microscope, le télescope, le ballon, l'appareil photo, la radio,
le fusil à répétition et bien d'autres choses. Là
encore, ses contemporains accueillent souvent bien mal ses inventions,
où de manière très inattendue. Faust se voit contraint
de fuir son pays l'Allemagne, pour se rendre en Angleterre où sa
frénésie de création continue. Mais, sa soif de progrès
et de savoir lui fait peu à peu perdre le sens des valeurs, et quand
on possède le savoir absolu, les tentations sont nombreuses d'en
abuser.
Aux froides vérités du docteur Faust, répondent
la stupidité, la superstition, la force de la tradition et des habitudes,
l'ambition, bref tous les défauts des hommes. L'évolution
des mentalités ne suit pas la vitesse à laquelle la science
progresse grâce à Faust. Le savoir ne va pas nécessairement
de pair avec la sagesse et les outils que Faust met au mains de l'humanité
sans lui laisser le temps de s'adapter.
En l'espace d'une vie, le docteur Faust de Michael Swanwick fait avancer
la civilisation de plusieurs siècles. L'auteur a réussi là
un roman étonnant, complètement fou dans son déroulement
et réjouissant pour l'esprit, où chaque chapitre est un nouveau
morceau d'anthologie, ponctué par les commentaires sarcastiques
et lapidaires de Méphistophélès qui observe et guide
Faust et semble beaucoup s'amuser des gesticulations des pauvres humains.
Mais, l'ampleur du propos n'empêche pas le livre d'être d'une
lecture facile, de rester à hauteur de ses personnages et de tenir
en moins de 300 pages. Michael Swanwick a réussi là un véritable
tour de force. Un livre qui force l'admiration. |